Jeudi 8 mars 4 08 /03 /Mars 18:14


 FUREUR  LESBIENNE 2 : Jade, à 38 ans, s'est toujours sentie profondément hétérosexuelle. Mais ce qui n'était qu'un simple jeu va se transformer en parcours dangereux. Dans l'atmosphère frénétique d'un club homo, les rivalités explosent, les désirs s'exacerbent, les passions se déchaînent. Bravant les interdits, Jade va laisser libre cours à ses désirs, submergée et dévastée par des envies qui dépassent l'entendement, un continent de plaisir intense, la découverte de l'amour avec une femme plus jeune, reflet d'une homosexualité refoulée. Se livrant sans retenue. Avec démesure et fureur.

Un instant, il pensa réellement qu'il n'y avait aucune chance qu'une femme la voit ainsi vêtue. Elle le charriait. C'était du bluff. Mais il devait la pousser jusqu'à ses derniers retranchements pour voir jusqu'où elle irait. La défier et piquer sa fierté.
- Et alors ? Tu es vraiment très sexy, mais sur quelle femme tu vas jeter ton dévolu, si tu oses vraiment aller jusqu'au bout ? Ce qui m'étonnerait beaucoup...

Elle lui jeta un petit coup d’œil en coin avec un sourire effronté.

- Ah bon, tu crois ça ? Présente-moi une femme qui aime les femmes et j'userai de mon charme sur elle.
Il n'en revenait pas. Un instant, il eut peur que son cœur explose tellement il battait vite sous l'effet de l'excitation.

Puis elle haussa les épaules avec un sourire taquin.

- Dommage, je n'en connais aucune... Une autre fois sans doute...

Bien sûr, elle avait joué avec lui, elle commençait à se défiler, mais il comptait bien forcer la chance en l'obligeant à tenir parole. Elle n'allait pas s'en tirer à si bon compte.

- Moi j'en connais une ! dit-il en criant presque, avec un peu trop de précipitation.

Elle se tourna vers lui, sourire figé.

- Ah ?

- Anne Klein. Une copine de terminale que j'ai revu par hasard il y 'a deux ans, à Nice. Je suis un peu son parcours par Facebook, elle est photographe professionnelle de mode, on s’envoie quelques messages, elle s'est installée du côté de Montpellier.

Elle fit semblant de s'y intéresser, mais sans grande conviction, comme regrettant de se retrouver au pied du mur. Amusé, il poursuivit avec un sadisme contenu.

- Au lycée, c'était une écorchée vive, impétueuse, irrévérencieuse et indépendante, fonctionnant à l'instinct sur des coups de cœur et ses passions. Une fille bizarre assez difficile à cerner, qui cumulait les aventures sans lendemain. Tout le monde la prenait pour une croqueuse de femmes, séductrice et indifférente, mais c'était faux. Quand j'ai appris à la connaitre, j'ai vu que sous son apparence détachée et sûre d’elle elle cachait en fait de nombreuses faiblesses. Beaucoup de failles. Encore une à qui la vie n'avait pas fait de cadeaux. Mais, à part ça, c'est une jolie femme. Brune, cheveux courts, yeux noisettes toujours pétillants de malice, très bien roulée, un sex-appeal redoutable, et surtout beaucoup de charme, un charisme fou. Je suis certain qu'elle te plairait...beaucoup.

Il appuya sur le dernier mot avec insistance, appuyant le sous-entendu d'un clin d’œil grivois. Elle se contenta de hausser les épaules d'un air indifférent, le visage impassible.

- Faut voir...


Cette nuit, émoustillés par leur petit scénario érotique, ils firent l'amour plus intensément.. Yannis fut très tendre, comme toujours. Pendant qu’il la cajolait, il lui demanda de lui parler, de lui raconter des choses excitantes. Encouragé par leur discussion du soir, où lui apparaissait d'autres facettes de sa femme, il osa lui avouer qu'il avait envie d’entendre ses fantasmes. Ce n’était pas gagné, elle était  plutôt du genre romantico-pudique, ascendant fleur bleue, sa chérie ! Elle fît d’abord comme s’il elle ne comprenait pas.  Comme il insistait, elle finit par lui confier entre deux baisers qu'elle s'était imaginée de temps en temps s'abandonner dans les bras d'une autre femme, être la proie docile et consentante d'une volcanique lesbienne, et puis...rien d'autre. Elle se ferma comme une huitre, affirmant que les fantasmes ne devaient jamais se réaliser, et que chacun avait son jardin secret. Cette femme était d’un conventionnel affligeant ! Alors, sans insister davantage, il lui demanda de fermer les yeux, de se laisser faire, et de laisser travailler son imagination, imaginer que c'était une femme qui la caressait pendant qu'il s'occupait d'elle. A contre- cœur, sans conviction, elle se prêta à son jeu, alors que sa langue était déjà bien occupée entre ses jambes. Et, à sa grande surprise, l'orgasme l'emporta très vite et très intensément, sans avoir le courage de retenir un cri libérateur.
D'habitude, quand il l'a faisait jouir, il lui demandait toujours si elle avait aimé. Et elle lui répondait toujours oui, même si parfois… Si parfois il lui manquait quelque chose, le grand frisson, la perte totale de contrôle, le déclic qui faisait la différence. Mais rien de grave ni d'alarmant, et puis il y' avait des choses plus importantes dans la vie, d'autres priorités, alors ce "oui" le rassurait. Et la rassurait tout autant. Elle ne voulait pas le contrarier ou le décevoir pour un sujet aussi puéril. Mais, là, chamboulée et en émoi, ce qu'elle ressentait dans son corps ne semblait ni anodin ou puéril. Important au contraire. Déstabilisant. Se disant qu’avec un orgasme comme celui-là, elle devait être autant clitoridienne que vaginale, alors qu'elle s'était toujours crue vaginale, comme si elle redécouvrait son corps.  C’était une sensation étrange, divine, bouleversante, un moment hors du temps. Troublant. Très excitant aussi, qui l'effrayait.

Serrés l'un contre l'autre dans le lit, ils apprécièrent chaque seconde après l'amour. En silence, comme pour ne pas briser le charme. Se languissant de gestes tendres, se perdant dans leur regard, se souriant, longuement.

Finalement, les premiers mots sortirent de la bouche de Jade. Son haleine était tiède, son corps nu encore frémissant, brûlant.

- Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.

- Quoi donc ?

- Ce jeu stupide, séduire une femme...

- Pourquoi ? Tu as peur ?

Pensivement, il caressait ses côtes saillantes, son ventre plat, ses seins insolents qui pointaient sous la couette. Puis sa main remonta avec amour vers la gorge, le menton, les joues.

Comme elle ne répondait pas, il reprit :

- Tu sais, j'ai bien senti la différence quand tu as joui. Et tu étais beaucoup plus réceptive. Comme si quelque chose en toi se réveillait. Ta carapace s'est fissurée, ta volupté s'est révélée, tes sens se sont enfiévrés, et je pense que c'est constructif. Un grand pas en avant.

- C'est si important que ça pour toi que je me lâche sexuellement ?

Elle soupira, puis posa son oreille sur la poitrine de son mari, au niveau de son cœur battant la chamade.

- Oui, ma chérie. On s'est éloigné tous les deux, sexuellement parlant. Je ne pense pas que ce soit de ta faute, ni la mienne. C'est la vie. La routine, le temps... Et je crois que ce petit jeu innocent et sans conséquence peut relancer notre sexualité et nous permettre de nous retrouver.

Elle a un petit rire cynique.

- Innocent ? Sans conséquence ? En es-tu certain ? Tu sais, mon chéri, quand j'ai joui tout à l'heure, en imaginant pour la première fois que c'était une autre personne qui me faisait l'amour, une femme, j'ai senti comme quelque chose de fort et de puissant me posséder, et cela m'a fait tellement peur que je me suis retenue, alors tu imagines si je ne l'avais pas fait ?...

Honteuse de s’être trop livrée, elle se referma. Pensant à ce qu'elle venait de dire. Persuadée que tout cela lui avait fait comprendre qu'elle avait au fond d'elle-même des restes d'une sorte d'instinct ancestral, primitif, animal, avec une nature secrète qui s'apprêtait à s'éveiller. 

A côté d'elle, Yannis serrait les mâchoires, maîtrisant l'émotion qui le submergeait. Il chercha à parler, mais ses lèvres restaient définitivement figées. Jade ressentit son malaise et lui demanda :

- Désolée... Je comprends que cela puisse te déranger... Je te fais peur ?

Un long silence. Yannis secoua finalement la tête.

- Tout cela va très vite. Sans le savoir, nous avons ouvert la boite de Pandore, et je pense qu'il est trop tard pour reculer. Allons jusqu'au bout et nous verrons bien. Il ne s'agit pas de coucher avec une autre femme. Juste de l'allumer et éveiller en toi ce petit grain de folie que tu as perdu. C'est tout.

Elle l'étreignit en riant comme une petite fille espiègle. Chassant toutes ses inquiétudes pour prendre toute cette histoire avec légèreté.

- Tu as raison. Et, quoi qu'il arrive, si cela m'excite prodigieusement, c'est toi seul qui en profitera de toute façon !

Ils basculèrent tous les deux sur le côté en se chamaillant un long moment. Ignorant les bruits de la tempête qui secouaient encore la maison.

 

Jade était vraisemblablement intriguée par Anne. Yannis s'en était vite rendue compte, d'autant plus qu'elle n'avait pas fait beaucoup d'effort pour dissimuler sa curiosité. Ils étaient là, assis sagement à regarder le spectacle, lorsqu'il remarqua que Jade tournait souvent la tête vers la droite. Il suivit son regard. Et alors aperçut Anne. Difficile de ne pas la remarquer, elle attirait l'attention, par sa façon impertinente et légère d'interpréter la mode, une désinvolture teintée d'insolence qui avait souvent le don d'agacer. Mais, malgré tout les moyens mis en œuvre pour éviter le bon goût et les tendances vestimentaires, la beauté d'Anne conservait son pouvoir magnétique, son charme ambigu, et rien ne semblait pouvoir l'enlaidir. Une rebelle au visage d'ange, à la fois femme-enfant  et garçon manqué. Vêtue d'un pantalon de treillis en Nylon ciré et d'un simple débardeur qui dessinait divinement ses petits seins bombés, elle était ultra-sexy. Anne regardait également dans leur direction, et paraissait fascinée par la présence de Jade. Yannis lui adressa un petit signe. Ils devaient se retrouver devant l'entrée, mais comme d'habitude le couple était arrivé en retard, la ponctualité n'étant pas leur fort. Il avait été facile pour lui de la convaincre de sortir avec eux, Anne étant une femme de la nuit, fêtarde, ne ratant jamais une occasion pour s'amuser. C'est donc elle qui leur avait proposé d'assister à un spectacle de cabaret d'un de ses amis, Julien à la salle des fêtes. Julien, méconnaissable en vamp distinguée, à la Marylin Monroe, effectuait son numéro de transformiste avec une perfection qui forçait le respect. Étourdissant, drôle et virtuose, il tenait un rôle de composition. Le spectacle était échevelé, moderne, fun, dans un décor grandiose. L'histoire était simple, une histoire d'amour destructrice et passionnelle, un mélodrame flamboyant, entre deux hommes que tout opposait. Julien jouait un chanteur déchu, ruiné, qui s'était enfermé dans la solitude et l'anonymat, marqué par la détresse, tout simplement parce qu'il devait assumer son choix d'être homo. Le scandale ne l'avait pas épargné, l'avait brisé, mais il préférait sa vie à celle de l'hypocrisie. Sa rencontre avec un jeune fugueur complètement paumé, en manque de repères mais à la voix sublime, allait bouleverser son existence. Il sortait de sa léthargie, l'amour allait ressusciter sa passion de chanter, sa force créatrice. Pour séduire le jeune homme, il allait composer des musiques rythmées et tourbillonnantes, avec des numéros dansés d'une incroyable beauté, et cette soudaine renaissance allait lui permettre d'arriver à ses fins. Le final s’achevait en apothéose, une comédie musicale grandiose,  qui renforçait majestueusement la puissance émotionnelle des principaux personnages qui trouvèrent ensemble dans l'amour un équilibre et une paix intérieure. Happy end. Yannis cria et battit des mains à tout rompre tandis que les applaudissements ne cessaient de s'amplifier.

Plus discrètement, Jade applaudissait doucement en se levant à son tour. Ils se laissèrent entraîner par la vague humaine qui les poussait vers l'extérieur.

-  Bonsoir, Yannis.

Anne était plantée au milieu de la foule, les fixant dans une attitude décontractée, un peu garçonne dans sa façon de tenir ses hanches et ses épaules. Mais ses seins qui pointaient sous le débardeur n'avaient rien de masculin.

Échange de bisous. Yannis les présenta.

Jade semblait mal à l'aise, et c'est nerveusement qu'elle s'empressa de dire :

- Enchantée. J'ai beaucoup aimé le spectacle.

Yannis intervint.

- Tu as beaucoup changé Anne, j'ai failli ne pas te reconnaitre.

- Changé ? En bien j'espère ? D'habitude, on me compare souvent au vilain petit canard qui attend d'être transformée en cygne, ce qui me laisse penser que seuls les contes pour enfants finissent toujours bien.

Jade esquissa un sourire timide.

- Cette fois-ci, je peux vous assurer que la morale de l'histoire est sauve.

- Génial ! Enfin une fin heureuse !

Yannis connaissait suffisamment Anne pour savoir que son assurance était forcée. Elle était aussi intimidée que troublée. Surtout troublée. Son regard brillant, ses lèvres qui frémissaient, sa soudaine fébrilité qui la rendait volubile et agitée, ce sont là des signes qui ne trompaient pas. Amusé, il les regarda tour à tour.

Anne dit brusquement :

- Bon, on va boire un coup au restaurant Le Paradisco. Julien doit nous y retrouver.

- Cela se trouve ou ? demanda Jade.

Anne, qui ne la quittait plus des yeux,  intervint vivement.

 - A Valras-Plage, en bord de mer. C'est pas loin... Le plus simple est que vous me suiviez, je roulerai doucement, et on se téléphone de toute façon si on se perds de vue.

- Bien sûr, aucun souci. De toute façon, je connais.

C'était Yannis qui venait de parler. Il faillit avoir la mâchoire pendante lorsque sa femme proposa naturellement.

- Si tu connais, mon chéri, tu ne vois pas d'inconvénient pour que je monte avec Anne. Cela nous permettra de faire plus ample connaissance.

Discrètement, sa femme lui adressa un petit sourire reconnaissant. Son audace le stupéfiait, jamais il ne l'avait vue si directe et résolue. Décidément, il allait de surprise en surprise ! Elle prenait son rôle un peu trop sérieusement, un jeu dangereux où elle se lançait un peu trop vite. Il y pensait encore alors qu'il roulait vers le centre ville, et se laissa suffisamment distraire pour se retrouver bloquer entre deux camions. La malchance le poursuivit, ce ne fut ensuite qu'une succession de feux rouges. Il lui fallut après quinze bonnes minutes pour trouver une place à proximité de l'hôtel. Il du s'y reprendre à deux fois en effectuant le plus mauvais créneau de sa vie. Difficile de se concentrer alors que plein de pensées se télescopaient dans sa tête. Sujet de préoccupation : Anne. Sans aucun doute, Jade lui avait tapé dans l'œil, mais il avait maintenant des remords à l'envoyer au casse-pipe, une histoire sans suite qui lui ferait certainement du mal. Et pour cause... Jamais rien ne se passerait entre elles. Sa femme, bien qu'il l'avait sentie déroutée, conformait toujours son existence à certains idéaux, et il restait persuadé qu'elle ne remettrait jamais en cause cet univers de certitudes auquel elle s'accrochait tant. L'idée de la voir avec une femme, même si c'était un vague fantasme,  lui paraissait si absurde que cela lui fit de la peine pour Anne. Jouer avec ses sentiments était cruel. Cette déception ne ferait que la fissurer davantage. Elle avait grandi sous le poids du malheur, frappée par une succession de coups durs dans sa chienne de vie, et une autre épreuve l'attendait prochainement : la visite de son père. C'est elle qui le lui avait dit quand il avait téléphoné. Son père était le principal responsable de ses angoisses permanentes, la source du problème, Anne avait appris à se haïr à cause de lui. Yannis se doutait bien qu'elle n'osera jamais lui avouer son homosexualité, elle continuera de garder en elle ce secret qu'elle estimait sale et honteux, au lieu de crever l'abcès et se débarrasser de ce lourd fardeau. Même si cela était le moyen le plus sûr de briser des liens déjà fragiles... Son père était un homme bourru et désabusé, veuf inconsolable, à l'esprit étroit et aux idées radicalement hermétiques, que Yannis avait eu le malheur de croiser lorsqu'il était en Terminale avec Anne. Il était du genre à croire que l'homosexualité était un vice génétique, une erreur de la nature, et il ne pardonnerait jamais à sa fille une telle abomination. Perdu pour perdu, autant lui balancer la vérité en pleine figure, c'est ce que Yannis aurait fait à la place de son amie. Mais Anne ne se jettera jamais à l'eau, inutile de revenir là-dessus. Décidément, elle avait peu changé... Yannis gagna la terrasse de l'hôtel. Une guirlande d'ampoules multicolores délimitait le périmètre de la salle à manger du coin bar. Des chandelles étaient fixées dans des bougeoirs sur chaque table. Anne et Jade étaient déjà installées, et Yannis eut du mal à reconnaître cette dernière tellement elle riait, pliée en deux, partant dans un fou rire incontrôlable. Anne faisait le clown, le visage plissé par une grimace enfantine qui la rendait terriblement drôle. Jade n'en pouvait plus, s'étouffant presque. Un serveur s'approcha de Yannis. Il le précéda pour l'accompagner jusqu'à leur table, tout contre la balustrade.

- Et bien, les filles, on s'amuse comme des folles. Racontez-moi…

Toutes les deux levèrent vers lui deux minois rieurs, les yeux imprégnés de larmes.  Le serveur, avec un large sourire indulgent, passa la commande. Anne attendit qu'elle se soit éloignée pour raconter d'une voix saccadée, ayant du mal à parler tellement elle avait envie de rire :

- Je lui racontais comment une de mes amies avait été obligé de se cacher sous le lit de son amante alors que le mari cocu était revenu à l'improviste ! Elle y 'est restée toute la nuit !

Yannis grimaça un sourire contraint, sans rien dire. Bientôt, ils parlèrent vite de choses et d'autres, mais Yannis avait  le vague sentiment d'être vraiment en trop. Persuadée encore que sa femme le faisait exprès pour l'agacer et le défier. Après tout, il le méritait bien c'est lui qui l'avait poussé à se lancer dans ce petit jeu... Vexée, il se plongea dans la contemplation de la baie, avec toutes ses lumières qui scintillaient dans la nuit et se reflétaient dans l'océan. De nombreux bateaux mouillaient au large, d'autres sillonnaient la baie, petits points lumineux qui progressaient lentement dans l'immensité sombre, là où l'horizon et la mer se confondaient. Un mouvement sur sa droite lui fit tourner la tête. Le serveur acheminait Julien vers leur table. Ses compagnes l'aperçurent également et se levèrent en même temps que lui. Tous trois ne purent s'empêcher d'applaudir, rendant hommage à sa prestation de tout à l'heure. Julien les gratifia d'un sourire qui fendait son beau visage d'une oreille à l'autre. Il s'était changé, démaquillé, vêtu avec goût et raffinement. Il s'assit à côté de Yannis, ce qui se révéla un choix judicieux car Anne et Jade eurent vite fait de ne plus les calculer, penchées l'une vers l'autre en abordant mille sujets différents, comme si le reste du monde n'existait pas. Yannis se sentit malgré lui un peu jaloux. Écoutant à peine ce que lui disait son voisin...

Jade s'éveilla à huit heures. Elle n'avait pas fermé les rideaux de sa fenêtre de chambre, pour que les premiers rayons du soleil passant au-dessus des maisons voisines la tirent doucement du sommeil. Cela ne dérangeait pas son mari, profiter ainsi du peu de soleil, car comme beaucoup de maisons de village, entassées les unes sur les autres, la lumière se faisait rare.

S'étirant, elle émergea avec l'odeur du lait chaud et des croissants. Elle s'étira de nouveau longuement, avec un petit soupir d'aise. Puis mit une robe de chambre pour se rendre dans la cuisine, où l'attendait Yannis, déjà prêt. Comme d'habitude, il était habillé avec élégance, et il sentait bon. Elle l'embrassa sur les lèvres avant de s'installer devant le petit déjeuner qui l'attendait.

- Mmm... Tu me gâtes ce matin. En quel honneur ?

- A notre folle nuit. C’était très constructif.

- Ah ? se contenta t-elle de répondre.

L'air faussement détaché, elle trempa la viennoiserie dans le lait auquel elle avait ajouté un peu de cacao. Ne pouvant s'empêcher de repenser à leur soirée avec Anne, à sa disposition d'esprit quand elle se trouvait avec cette femme, enjouée, insouciante, débordante de gaieté, et elle comprenait cette humeur; elle la reconnut pour l'avoir jadis goûtée, elle aussi, au tout début avec Yannis, quand elle était littéralement sous son charme. Où l'on avait l'impression que la vie était belle, fascinante, qu'il y avait mille choses merveilleuses à découvrir, que le monde était plein de couleurs, de passion, de surprises et de nouveautés. Et si, malgré elle, Jade avait joué au début la carte de la provocation, pour titiller son macho de mari, elle devait reconnaitre que le courant avec Anne était très bien passé. Trop bien passé...

Elle remarqua que Yannis, resté debout face à elle, guettait sa réaction. Puis, à une sonnerie, il sortit son portable de la poche de son pantalon et le manipula nerveusement.

- Qu'y a-t-il ?

- C' est Anne. Un sms où elle dit qu'elle a passé un excellent moment passé en notre compagnie et qu'elle veut remettre ça. Samedi prochain. Elle nous propose d'aller en Discothèque, à Montpellier. C'est... c'est une boite homo.

Elle s’efforça de garder un visage serein en levant les yeux sur lui.

- Je ne pense pas que cela soit une bonne idée. C'est malsain. Et malhonnête. On se joue d'elle et c'est cruel.

Elle écrasait un croissant entre ses doigts sans s'en rendre compte, refoulant une bouffée de colère contre lui. Et contre elle-même. Qu'est-ce qui leur avait pris de se lancer dans une telle histoire ?

- Moi je crois qu'elle a le béguin pour toi ! se contenta t-il de répondre d'un ton sarcastique.

La bouche de Jade s'ouvrit toute grande et le sang reflua de son visage.

- Peut-être... Peut-être pas... Mais c'est dégueulasse de lui donner des illusions, on n'a pas à jouer avec les sentiments des autres.

Yannis sourit et hocha la tête d'un air entendu.

- Ok. C'est la dernière fois. La dernière nuit. Et après on arrête les frais. Je lui réponds d'accord pour samedi prochain.

Elle détourna les yeux, pour qu'il ne puisse pas lire ses sombres pensées. Elle se sentait faible. Et honteuse de ne pas se montrer plus ferme et convaincante. Avec l'intime conviction qu'elle avait envie au fond d'elle-même de revoir Anne, et que tous les deux s'aventuraient sur un terrain vraiment dangereux.

 

Le serveur semblait branché sur du 220 volt. Cabotin, virevoltant, il effectuait sur le bar un numéro acrobatique qui provoquait cris et encouragements. La foule était déchaînée, applaudissant à tout rompre pendant que l'employé sautait comme une puce excitée, préparant un cocktail sur le rythme trépidant d'une musique techno. En voilà un qui avait sans doute fantasmé sur Tom Cruise dans son film " Cocktail" ! Après une dernière pirouette, il sauta du bar et atterrit sur la piste de danse. Quelques modestes révérences devant les félicitations du public, et enfin il se diriga vers ses clients qui l'attendaient patiemment, riant et applaudissant.

Le cœur léger, Yannis commença à battre le tempo de la musique. Il avait une pêche d'enfer ! Le monde de la nuit avait été auparavant son univers avant qu'il ne s'assagisse dans sa vie de couple. Ici, il y' avait une ambiance du tonnerre, le "Scorpion Rouge" n'etant pas une boite mythique pour rien, et restait le lieu rêvé d'une jeunesse dorée, branchée et extravagante qui se battait pour avoir le privilège d'y pénétrer. Ici, on pouvait donner libre cours à toutes ses pulsions inavouables, dévoiler ses péchés mignons, avouer ses différences sans tabou, sans complexe. Dans cette spirale infernale où tournoyaient tous les genres et toutes les libertés,  les libidos les plus rares se mêlaient aux licences les plus effrénées. C'était le lieu de tous les charmes, toutes les voluptés. Le décor était à l'image des folies qui s'y déroulaient. Décor futuriste en métal, plastiques multicolores, couleurs fluorescentes et irréelles, tables en verre avec appliques dorées, tout était très tape à l'œil. Comme le personnel extravagant. Deux des serveurs, déguisés en drag queens, se la coulaient douce derrière un pilier en marbre, plus occupés à se remplir mutuellement la bouche de baisers enflammés au lieu de remplir les verres des clients.

SUITE ICI

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Par Nicogarner - Publié dans : Romans-Photos érotiques. - Communauté : LesMeilleursBlogsdeSexe
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